L’Arabie Saoudite se montre : L’ambitieux Soft Power version MBS
Le territoire dirigé par la dynastie Saoud l’a bien compris. Il faut se secouer pour ne pas laisser le voisin qatari, à la surface habitable moins importante, confisquer le titre de « destination privilégiée des affaires. »
Surréaliste, futuriste… dystopique
The Line, ou Trojena, c’est selon, ne sont que des noms permettant de nommer l’ensemble ou un bout de l’invraisemblable et impétueux projet de ville intelligente, essentiellement futuriste et ultra-connectée, que projette l’Arabie Saoudite. Les travaux de construction ont bel et bien été lancés en octobre 2022, en plein milieu du désert arabique à Neom. En effet, c’est en 2017 que le projet est officiellement présenté par les autorités saoudiennes, avec pour ambition majeure de proposer au monde un « ailleurs » onirique, qui pourrait remettre en cause l’offre touristique asiatique voire, planétaire.
Le qualificatif « dystopique » fut donc très trouvé pour qualifier ce projet de cité qui semble aller au-delà de la banale utopie. Il aurait été pensé autour de l’année 2010, avec pour objectif principal, la construction d’une ville écologique de 170 kilomètres de long pouvant contenir neuf millions de résidents permanents sur une surface de 30 km², situés principalement en bordure de la Mer rouge. Une cité linéaire à l’allure d’un miroir géant vu de l’extérieur, sans route ni voitures, constituer essentiellement de deux immenses gratte-ciels parallèles de 500 mètres de haut chacun. Tous les services de premières nécessités seraient accessibles à cinq minutes de marche, mais l’on pourrait aller d’un bout à l’autre du linéaire futuriste en 20 minutes à bord d’un train à grande vitesse, à en croire les promoteurs.
Parallèlement à The Line, l’autre ville artificielle hyper-connectée baptisée « Trojena » devrait se greffer à une cinquantaine de kilomètres dans les montagnes de Neom. Une future zone touristique déjà candidate à l’organisation des Jeux Asiatiques d’hiver de 2029 et qui devrait accueillir des pistes de ski ouvertes toute l’année, un lac artificiel, des manoirs, et des hôtels de luxe. Le puissant prince héritier Mohammed Ben Salmane y tient particulièrement. Coût de la première phase étendue jusqu’en 2030, 1.200 milliards de riyals saoudiens, soient environ 319 milliards $.
Efficaces par le Sport
En marge des approches politiques et économiques, il y a le non-négligeable pouvoir du sport. Et les Saoud l’ont compris, il faut saisir la balle au bond. Alors en dehors des multiples investissements dans le secteur du marketing sportif à travers la planète, il a fallu rediriger les spots lumineux vers la terre d’Arabie pour mieux cristalliser les attentions. Désormais, si les labels saoudiens continueront de s’afficher sur des bannières occidentales, africaines ou asiatiques, ils devront en priorité alimenter le mouvement sportif sur le plan local, et de la manière la plus significative. Le calendrier sportif saoudien depuis deux années est des plus attrayants et considérablement dense, avec des évènements à l’exposition médiatique graduellement importante.
Invariablement, nous pourrions évoquer déjà ces évènements sportifs de haut niveau dont ils ont décidé d’accueillir l’organisation à l’instar des Super Coupes d’Espagne et d’Italie en ce mois de janvier 2023, puis, en interne, le Grand Prix de Formule 1 d’Arabie Saoudite qui se tient en nocturne sur le circuit urbain tout neuf de Djeddah depuis 2021 et dont la conception et la réalisation ont été supervisées par l’ancien pilote d’origine autrichienne Alexander Wurz. Il a pris la place au calendrier de la FIA, du Grand Prix de Bahreïn jugé désormais moins rentable et moins sécurisé. Pour cette première de 2021, une moyenne de 1,27 millions de téléspectateurs soit une part d’audience de 6,1% sur la chaîne cryptée Canal+ ; le Tour d’Arabie Saoudite rebaptisée officiellement Saudi Tour, est revenu au-devant de la scène en 2020, organisée par l’entreprise française d’évènements sportifs Amaury Sport Organisation (ASO), qui porte également le Tour de France, le Paris-Roubaix, le Paris-Nice, le Rallye de Dakar, le Marathon de Paris, l’Open de France de Tennis, etc. Vous comprenez que par ce choix, le gouvernement saoudien donne une fois de plus une priorité à la compétence, dans un souci de performance.
Les icônes…
Si jusque-là l’on considérait les compétitions sportives locales comme des points de chutes dorés pour retraités, dorénavant et ce pour peut-être très longtemps, la géopolitique sportive mondiale devrait être reconsidérée. Le plus gros salaire jamais versé à un footballeur encore en activité se déploie bel et bien sur les pelouses saoudiennes depuis les premiers jours de ce mois de janvier 2023. Le Portugais Cristiano Ronaldo, le CR7 puisqu’il s’agit de lui, évolue désormais à Al-Nassr de Riyad, l’une des principales formations sportives d’Arabie Saoudite, jusqu’en 2025, pour un contrat d’un montant d’environ 200 millions d’euros par an, primes commerciales comprises, et un salaire estimé à près de 70 millions. Rappelons par la même occasion, le quintuple Ballon d’Or FIFA est l’humain le plus suivi sur les réseaux sociaux avec pas moins de 517 millions d’abonnés sur l’ensemble des plates-formes sélectionnées, notamment Facebook et Instagram. Le footballeur devient donc un ambassadeur extraordinaire pour le royaume. Et il pourrait être rejoint dans la foulée par d’autres noms parmi les plus illustres et les plus compétitifs du circuit professionnel. L’on évoque notamment Manuel Neur, Lionel Messi, Eden Hazard, Pep Guardiola et bien d’autres encore. Les prochains jours pourraient nous révéler un lot de bonnes surprises et une liste d’icônes idoines, pour une opération de charme déjà bien entamée.